AU FIL DU TEMPS

     AU FIL DU TEMPS

Mes veines sont une rivière,
rouge au coucher du soleil, bleue à son réveil.

Elles se faufilent à travers des montagnes. Coulent vers mon cœur.

Elles sont la vie pour un ruisseau, finissant dans l’océan.

Elles sont les racines d’un arbre.

Je fleuri au printemps.

J’aimerai voir des nids se construire sur mes branches.

J’ai envie d’avoir des fruits identiques aux grenades.

De voir les bucherons pleurer avant de me couper.

La déchéance s’essouffler, sous mon l’ombre à midi.

J’ai envie que le temps arrête son compteur pour laisser arriver une vie meilleure.

Là, je suis capable de me taillader les veines, de couvrir de ma sève le monde et son rêve.

Pour les voir s’unir dès leur réveil.
Et vivre main dans la main jusqu’au coucher du soleil.

J’aimerai qu’ils viennent, à midi, le soir, respirer le parfum de mes veines. Gouter ma sève.

Que les papillons tissent leurs cocons sur mes branches.

Que les amoureux construisent leurs avenirs, et reviennent avec leurs enfants.

Au fil du temps.
Je deviendrai un arbre mort.

Zoran Savic